Double diplômé architecte et ingénieur en génie climatique et énergétique en 2020, Victor Moniot a choisi de mettre ses compétences et convictions au service de la transition énergétique d'un territoire qui lui est cher, les Ardennes. Il pilote la rénovation énergétique des bâtiments de l'agglomération et conseille les élus pour un usage sobre et bas carbone de l'énergie. Rencontre avec un ingénieur qui marie réflexion et action.

Par Stéphanie Robert

Depuis fin 2020, Victor Moniot est chargé de mission climat air énergie à la Communauté d’agglomération Ardenne Métropole, qui rassemble 58 communes, en grande partie rurales, autour de Charleville-Mézières et Sedan. C’est le territoire où il est né, où il a grandi et qu’il a voulu servir après avoir vu l’offre d’emploi diffusée par l’INSA Strasbourg à ses diplômés. « J’y ai vu une opportunité. Le territoire a tendance à perdre des habitants. Je suis parti à Strasbourg pour mes études, et y revenir pour mettre à profit mes compétences avait du sens pour moi. Je cherche à avoir un impact positif sur le territoire. Je trouve également pertinent de travailler pour le public, le but n’est pas lucratif, mais d’utiliser l’argent public au mieux » raconte-t-il.

Rénovation et politique énergétique

La mission climat air énergie a été créée en même temps que son poste, fin 2020. Sa mission, qu’il a contribué à définir, comprend deux volets. Le premier est la rénovation énergétique des bâtiments publics, comme les centres aquatiques, la médiathèque ou les bâtiments administratifs. Il représente la Communauté d’agglomération et agit en maître d’ouvrage. « Alors que mes études m’avaient plutôt préparé à être du côté maître d’œuvre, en bureau d’études ou agence d’architecture » souligne-t-il. Il précise le besoin, choisit les bâtiments, gère le budget, missionne les prestataires via les marchés publics, et suit les chantiers.

L’autre volet consiste à conseiller les élus et à orienter la politique énergétique du territoire, en étroite relation avec la vice-présidente chargée du développement durable. « J’accompagne par exemple les projets d’énergies renouvelables, pertinentes pour notre territoire, comme la méthanisation ou le photovoltaïque. J’apporte mon expertise sur les sujets énergétiques et climatiques, j’écris les rapports pour les synthétiser et les expliquer aux élus de l’agglomération et des mairies ».

Le choix de la maîtrise d’ouvrage et du public

« J’encourage les matériaux bio-sourcés, le réemploi, car ils sont une réponse cohérente et pertinente aux enjeux d’aujourd’hui. C’est aussi une des raisons qui m’ont fait choisir la maîtrise d’ouvrage : pouvoir peser dans la balance, faire des choix plus pertinents en accord avec mes valeurs. Dans un an, je ferai le bilan : est-ce que j’aurai réussi ou aurais-je dû faire trop de concessions ? » confie-t-il.

Victor Moniot est contractuel, embauché pour trois ans renouvelables. De par sa position transversale, il collabore avec une multitude de personnes d’horizons divers : élus, services de l’État, de la Région et des villes, techniciens, chargés des ressources humaines ou de l’agriculture, juristes, administratifs… C’est une ouverture et une richesse qui lui plaisent particulièrement.

L’apport de l’ingénierie et de l’architecture

Ses études d’architecte lui ont autant apporté que ses études d’ingénieur en génie climatique. Il explique : « Les études d’architecture nous donnent une bonne ouverture sur le monde, par des réflexions sur nos modes de vie, l’aménagement et le fonctionnement du territoire, l’avenir de nos sociétés. Elles m’ont donné envie de questionner le territoire de demain. Et mes études en génie climatique et énergétique m’ont apporté une bonne expertise en thermique du bâtiment. Mes études à l’INSA Strasbourg m’ont appris à gérer la pression, le stress, à hiérarchiser les priorités. Elles m’ont aussi donné un bon esprit de synthèse, pour expliquer et synthétiser des sujets complexes en moins de 10 minutes ou moins de trois pages. »

Construire sa réflexion, mûrir ses choix

Après son bac en 2013, les études d’ingénieurs étaient une évidence, et il choisit l’INSA Strasbourg pour le double cursus ingénieur et architecte. « J’ai choisi le génie climatique et énergétique car je voulais construire des maisons BBC (Bâtiment Basse Consommation) écologiques. Puis, j’ai construit ma réflexion, et je pense qu’il est beaucoup plus pertinent et lucide de rénover l’existant, par exemple, les HLM construits dans les années 70 où vivent des personnes en situation de précarité, que de construire des villas écologiques sur des terres non bâties. »

Il a réalisé ses stages et projets de fin d’études, dans cette même réflexion mêlant énergie, architecture et territoire : stage ouvrier dans l’installation de panneaux solaires, stages en bureau d’études sur la rénovation thermique et le bâtiment écologique, stage en agence d’architecture dans un écovillage irlandais… « Pour mon projet de fin d’études en ingénierie, je me suis intéressé aux alternatives à la climatisation des immeubles de bureaux, au confort d’été passif. Et pour celui en architecture, j’ai questionné l’avenir des territoires ruraux sans énergies fossiles » ajoute-t-il.

La tente des glaneurs

Étudiant, il a aussi co-créé l’association la tente des glaneurs Strasbourg, qui consiste à collecter les invendus des marchés pour les redistribuer gratuitement, notamment aux personnes dans le besoin. « L’association a un but social et écologique, elle perdure, elle a beaucoup de bénévoles, ça me fait vraiment plaisir » dit-il.

Parallèlement à son travail, il prépare à l’INSA Strasbourg l’habilitation à exercer la maîtrise d’œuvre en son nom propre (HMONP) pour pouvoir exercer plus tard l’architecture en son nom.

Son message aux étudiants est le suivant :

« Les études sont une belle opportunité pour questionner le monde qui nous entoure et imaginer celui de demain. L’imaginaire est indispensable pour faire évoluer la société. N’hésitez pas à être créatifs, anticonformistes, idéalistes et à vous faire plaisir ! »